Le terroriste noir : un récit de guerre qui ne passionne guère
Je n’ai pas apprécié le terroriste noir de Tierno Monénembo, le style et la narration étant principalement en cause. Tout d’abord, il est parfois difficile de déterminer de quel personnage il est question, puisque les pronoms personnels sont souvent employés et que les noms sont peu répétés. Un chapitre commence, par exemple, par un « Il » désignant Addi Bâ, qui n’apparaît pas dans le chapitre précédent. Il s’agit probablement d’un effet de style destiné à mettre l’emphase sur le personnage principal : le « il » en début de chapitre ne pouvant désigner que lui, j’ai cependant trouvé cette technique maladroite et le passage soudain d’un sujet à un autre donne l’impression que la pensée de l’écrivain est quelque peu confuse.
Il en va de même pour la narration faite par une octogénaire dénommée Germaine Tergoresse, habitante de Romaincourt qui retrace le parcours d’Addi Bâ pour son neveu. Cette narratrice n’est donc pas censée être omnisciente, elle raconte cependant chaque scène comme si elle y était, bien que ce ne soit pas toujours le cas. Quelques scènes ont Germaine ou Etienne, un de ses amis, pour témoin. Certaines d’entre elles sont néanmoins décrites en détail alors qu’aucun des compères n’était présent et suggèrent un changement de point de vue narratif, ce qui me parait peu vraisemblable puisque Germaine apostrophe souvent le neveu d’Addi Bâ au cours de son récit en disant ‘monsieur’ ou ‘votre oncle’. De plus, ce choix narratif est peu propice à la description des sentiments des personnages, ce qu’aurait permis le point de vue omniscient ou, au moins pour les sentiments du personnage principal, le point de vue interne. Celui de Germaine est, à mon avis, peu intéressant puisque son rôle dans l’action est loin d’être primordial et qu’elle nous confie donc rarement ses ressentis sur les événements.
La trame ne m’a guère plus emballée, les actions sont très répétitives : Addi Bâ se cache dans la forêt, il se cache dans un appartement de fonction, il rend visite aux Tergoresse, il rend visite aux Valdenaire, il ne veut pas enlever son uniforme, il fait du vélo dans les champs, les villageois de Romaincourt sont méfiants à son égard, le seul 'nègre' qu'ils aient jamais vu. Nombre des faits relatés sont d’ailleurs très prosaïques : l’alimentation du héros est, en effet, un sujet qui revient souvent, bien qu’il soit peu passionnant. Un peu de changement est le bienvenu lorsqu’entre en jeu la Résistance, mais il est toujours question des faits et non de la psychologie des personnages.
Malgré tout, j’ai été touchée par le sort du héros et par la dernière phrase du roman, ce qui n’aura malheureusement pas suffi à celui-ci pour remonter dans mon estime. Ce récit aurait pu être plus émouvant et captivant s’il avait été un peu plus romancé ; cependant, l’auteur voulait peut-être rester fidèle à la vie d’Addi Bâ et a donc préféré ne pas y introduire sa propre interprétation, explication plausible puisque son œuvre relate une histoire vraie. Son roman biographique ne m’aura pas conquise, car il ne m’a pas passionnée en se préoccupant davantage de la vie militaire du héros que de l’homme qui se cachait derrière l’uniforme.
Claire
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